Visiter le 12e arrondissement de Paris
Tout comme le précédent, le douzième arrondissement n’apparaît pas comme une destination touristique de pointe. Dans cet ancien quartier d’ébénistes et de viticulteurs, il doit bien rester quelques ateliers ou vestiges de la campagne. Sinon de la campagne, au moins de la forêt. Et ce que l’on peut dire, c’est qu’il y en a plus d’un arbre ! Grâce au bois de Vincennes, le douzième arrondissement est presque le plus vaste de Paris. En effet, le seizième le devance de 5 hectares ! Comme d’habitude, nous allons visiter les églises, parcourir les rues et traquer les détails pour faire du douzième arrondissement une belle découverte.
Un peu d’histoire
Longtemps, le territoire du douzième arrondissement ne fût pas dans Paris. Le faubourg Saint-Antoine constituait la partie nord-ouest, tandis que deux villages, Bercy et Saint-Mandé, ainsi que par le bois de Vincennes, constituaient la partie est. C’est ici que l’on a retrouvé les plus anciens vestiges d’occupation humaine à Paris : un village datant d’une période comprise entre 4500 et 3800 ans avant J.-C. Durant l’Antiquité, une voie romaine menant à Melun traversait ce terrain couvert de forêts et de marais.
Au Moyen-Âge, Charles V souhaite établir le centre administratif du royaume au château de Vincennes. Finalement, le projet ne verra pas le jour. Au nord-ouest, le faubourg Saint-Antoine se développe autour de l’activité d’ébénisterie, puis de façon plus générale d’ameublement. Le bois, longtemps domaine de chasses royales, est aménagé par Louis XV, qui fait percer des allées. Son successeur, Louis XVI, prévoit la démolition de la Bastille et l’aménagement d’une place royale. Plus loin dans la campagne, les aristocrates se font construire des folies : la folie Rambouillet, le château de Bercy… Quartier populaire, le faubourg Saint-Antoine est en première ligne lors de la Révolution. Il participe grandement aux grands événements tels que la prise de la Bastille et celle du palais des Tuileries. Il conserve cette tendance rebelle en 1830 ou encore en 1848.
Au XIXe siècle, on réaménage le douzième arrondissement : percement de grands axes routiers, constructions de marchés, de la gare de Lyon, aménagement du bois de Vincennes… Les aménagements continuent au siècle suivant. Les dirigeants effectuent en effet de grands projets architecturaux de l’est de Paris, la ville étant davantage aménagée à l’ouest.
Le quartier des Quinze-Vingts
Nos débuts sur la rue de Charenton
Notre visite du douzième arrondissement débute sur la rue de Charenton, que l’on aura l’occasion de retrouver plus tard, puisqu’elle parcourt tout le douzième arrondissement. Aux numéros 24 à 34 se trouve l’hôpital des Quinze-Vingts. Nous en voyons l’entrée. Si je le signale, c’est que ce bâtiment à l’apparence anodine a tout de même donné son nom au quartier. Saint-Louis fît bâtir l’hospice des Quinze-Vingts dans la rue Saint-Honoré en 1260. On ne sait pas bien pourquoi, le récit qui en est fait mentionne un besoin de porter secours à trois cents (15 x 20) chevaliers faits prisonniers par les Sarrasins lors de la septième croisade, mais cela n’est pas attesté par les sources de l’époque.
Ce qui est sûr, c’est que l’hospice prend en charge les pauvres aveugles de la capitale. A la fin du XVIIIe siècle, le cardinal de Rohan fait déménager l’hospice rue Charenton. Il prend place dans l’ancienne caserne de la compagnie de mousquetaires, les Mousquetaires-Noirs. Le bâtiment date de la fin du XVIIe siècle. Sur le mur à droite de l’entrée, une plaque rappelle la crue de la Seine de 1740. Précisons que la rue de Charenton se situe sur le lit supérieur de la Seine, ce qui signifie que les terrains entre la Seine et cette rue sont en zone inondable !
Remarquez au numéro 30 les deux bay-windows avec chacune une guirlande et un visage au milieu.
Tournons à droite, rue Moreau, pour rejoindre l’avenue Daumesnil, que nous prenons à droite. Avançons un peu dans la rue de Lyon, où nous notons la présence d’une fleur (marguerite ?) au-dessus de chaque fenêtre aux deux premiers étages de l’immeuble au numéro 61.
L’avenue Daumesnil
Le Viaduc des Arts et la Coulée Verte
Retournons sur l’avenue Daumesnil. Au début de l’avenue, à gauche, un escalier mène à la Coulée Verte, qui prend place sur le Viaduc des Arts. De 1859 à 1969, un train y circulait, en direction de la banlieue Est. Les promeneurs ont dorénavant remplacé le train. Ils peuvent maintenant parcourir les 4.5 km de cette promenade en direction du bois de Vincennes, à l’ombre des arbres qui y ont poussé. Ils n’y ont pas poussé au hasard, la coulée verte a en effet été aménagée par l’architecte Philippe Mathieux et le paysagiste Jacques Vergely.
La Coulée Verte offre une perspective unique sur les toits des immeubles de l’avenue Daumesnil, sur lesquels nous reviendrons, pour certains d’entre eux. En dessous, les arches du Viaduc des Arts accueillent de nombreuses boutiques et ateliers d’artistes ou artisans. Pour le reste de la promenade, je vais décrire un itinéraire passant par en bas, mais vous pouvez bien sûr vous promener sur la Coulée Verte.
Soutenant le viaduc lorsqu’il enjambe une avenue, telle que l’avenue Ledru Rollin, les piliers arborent des chapiteaux en forme de lotus. Cela témoigne de l’engouement pour l’Égypte qui avait cours en France au XIXe siècle, comme nous l’avions vu dans le quartier du Sentier, lors de notre visite du deuxième arrondissement, ou avec la fontaine égyptienne du Fellah, vue lors de notre visite du sixième arrondissement.
La rue Traversière permet d’accéder, à gauche, à l’église Saint-Antoine des Quinze-Vingts.
L’église Saint-Antoine des Quinze-Vingts
Afin de remplacer la chapelle de l’hospice des Quinze-Vingts, l’architecte Joseph-Emile Vaudremer établit les plans de l’église Saint-Antoine des Quinze-Vingts, qui voit le jour en 1903. Cette église de style néo-roman possède une nef assez sombre, dont le plafond en angle est régulièrement coupé par des arcs arrondis, typiques du style roman, puis néo-roman. Ce style est également visible dans les arcades de chaque côté de la nef.
L’église étant construite en pleine période Art nouveau, on retrouve des traces de ce style architectural. Les autels absidiaux où le beige et le marron clair dominent, ainsi que l’orgue de chœur, brun, du même brun que les murs qui l’entourent, évoquent le style de l’école de Nancy. Deux peintures murales, réalisées par le peintre Georges-Victor Claude, entourent le chœur. Dans ces peintures aussi, le brun domine. Au-dessus du chœur, la coupole, de taille modeste, est constituée de verres moulés liés avec du ciment. Enfin, le chemin de croix est plus récent. En effet, c’est une abbesse de l’abbaye de Dourgne, dans le Tarn, qui l’a réalisé en 2009.
En sortant, ne manquez pas l’immeuble du numéro 68, richement décoré : pilastres corinthiens, guirlandes, balcon coquillage…
Nous continuons ensuite notre promenade sur l’avenue Daumesnil.
L’immeuble Art nouveau au numéro 17 de la rue Michel Chasles se remarque grâce à sa rotonde, à l’angle, et quelques guirlandes. De même au numéro 12 de la rue Abel, où deux immeubles de style Art nouveau se font face, avec des décors intéressants autour des fenêtres du haut. Au milieu des deux, ne pas rater l’immeuble au numéro 30, de style Art nouveau, où deux hérons dans des roseaux encadrent la porte. La façade ne manque pas non plus de décorations !
La rue Crémieux
Nous prenons la rue Parrot, puis tournons à droite, rue de Lyon. A gauche, la rue Crémieux, avec ses maisons colorées, est une ancienne cité ouvrière réalisée en 1857. La rue Crémieux n’était pas colorée à ses débuts. Ce n’est qu’en 1993, à la piétonisation de la rue, que les habitants durent faire des ravalements de façade et choisirent de les colorer. Un choix que certains regrettent désormais, la rue étant envahie par les touristes !
Nous continuons sur la rue de Lyon et tournons à gauche, avenue Ledru Rollin
L’avenue Ledru Rollin dans le douzième arrondissement
Nous avions déjà parcouru cette avenue lors de notre visite du onzième arrondissement, et y avions vu plusieurs bâtiments de style Art nouveau. Reprenons donc notre promenade sur cette avenue, jusqu’à la Seine. Au numéro 40, remarquons un curieux visage au-dessus de la porte d’entrée. On dirait un gaulois tout droit sorti de l’Antiquité ! On observe ensuite, aux numéros 36 et 38, une intéressante évolution, allant de la bay-window reposant sur une console en forme de coquillage à celle du numéro 38, plus moderne, aux formes rectangulaires.
Plus loin, l’immeuble au numéro 26 présente lui aussi deux bay-windows, de style Art déco (forme géométrique de celles-ci, murs en briques…). En face, l’immeuble est du style précédent. Il comporte quelques guirlandes et une rotonde à l’angle. L’immeuble au numéro 22 semble être un mixte des deux styles, avec deux bay-windows reposant sur des coquillages et aux fenêtres carrées. Enfin, avant de passer à la suite, remarquons l’immeuble décoré au numéro 12.
Tournons à gauche, quai de la Rapée. L’architecte Aymeric Zublena a construit l’immeuble à la façade en verre en 1992. Mais si vous y prêtez une plus grande attention, vous remarquerez que la façade en verre est en réalité une immense porte coulissante !
La gare de Lyon et ses alentours
Prenons à gauche le boulevard Diderot. L’immeuble au numéro 4 est de style Art nouveau, reconnaissable aux décorations végétales sous les bay-windows. Au numéro 21 bis, l’immeuble est richement décoré de pilastres et autres décors sculptés.
En face se trouve la gare de Lyon. On construit un premier embarcadère en 1849, puis une gare la remplace en 1855. En 1899, l’architecte Marius Toudoire construit l’édifice actuel, rénové en 1927, qui possède une grande tour horloge. Je suis passé de très nombreuses fois à la gare de Lyon, mais je ne suis jamais sorti directement de cette gare. Je n’avais donc jamais vu l’extérieur avant ma visite du douzième arrondissement !
A l’intérieur, on trouve dans la salle des guichets une grande fresque qui présente les différentes destinations accessibles depuis la gare de Lyon. Les trains vont plus loin que Lyon ! Enfin, le repas y est un peu cher, mais le restaurant Le Train bleu est de style néo-baroque et vous permettra de prendre un bon repas dans un environnement rappelant le début du XXe siècle. Certaines parties du restaurant sont classées monument historique ! Enfin, précisions que c’est à la gare de Lyon que vous pourrez prendre un train (RER D ou RER R, direct) pour visiter la ville de Melun. Je suis sûr que cela fait longtemps que vous y pensez ! Et grâce à moi, vous allez enfin pouvoir réaliser votre rêve. De rien, il n’y a pas de quoi !
Le quartier Bercy
Le Ministère des Finances
Nous empruntons la rue de Bercy, qui longe les rails, côté Seine. Les façades en verre nous font entrer dans une époque que nous avons rarement vue lors de nos précédentes visites ! Nous passons sous un grand immeuble : c’est le Ministère des Finances, aussi appelé Bercy. Ce sont les architectes Paul Chemetov et Borja Huidobro qui ont réalisé cet immeuble en 1989. Au début du XVIIIe siècle, M. de Bercy, intendant des finances, avait son château dans ce quartier, alors que plusieurs banquiers y avaient des maisons de plaisance.
Le Palais omnisport de Paris-Bercy
En face, on trouve le Palais omnisport de Paris-Bercy. La salle omnisport peut accueillir 20 000 spectateurs ! Il se distingue à l’extérieur par sa forme pyramidale et ses parois recouvertes d’herbe, et à l’intérieur par l’absence de poteaux dans les gradins pour soutenir le toit.
Le Palais omnisport de Paris-Bercy se nomme désormais AccorHotels Arena à la suite d’un contrat de parrainage avec le groupe hôtelier qui a sponsorisé les travaux de rénovation de 2014.
Quelques curiosités dans la rue de Bercy
Au numéro 51, la Cinémathèque française dispose de quatre salles de projection installées dans un immeuble à l’architecture moderne, ainsi qu’une médiathèque et un bar-restaurant. On y trouve également le musée Méliès, du nom d’un précurseur du cinéma français, qui à partir de ses représentations de tours de magie a créé parmi les premiers films. Le musée présente ainsi l’histoire de Georges Méliès et les débuts du cinéma, à travers une collection d’objets aux drôles de noms, tels que “disque stroboscopique” ou “phénakistiscope”, et de projection des premiers films, tels que le voyage dans la lune. Des expositions temporaires complètent la collection sur le thème du cinéma. Les missions de la cinémathèque sont la préservation, la restauration et la diffusion de films du Patrimoine cinématographique.
Au numéro 41, un fronton sculpté d’un putti orne la porte. Aux côtés du putti, un pied de vigne rappelle l’ancienne activité du quartier. Cependant, ce qui est plus étonnant, c’est que le reste de l’immeuble est plutôt banal, contrairement à ce fronton.
Bercy a longtemps été un village à la campagne. Puis il devient un entrepôt de vin en 1880. Cependant, les pavillons à droite de la rue, entre les numéros 7 et 39 ne témoignent pas de cette époque. Ils ont en fait été construits en 1908 pour loger les ouvriers travaillant dans le métro. Toujours est-il qu’il y a dans cette portion de la rue de Bercy comme un air de campagne. Et ce n’est pas la suite de la visite qui nous fera dire le contraire.
Le parc de Bercy
A la place des entrepôts de vins, le parc de Bercy a été aménagé, avec de grandes pelouses et un jardin : le jardin Yitzhak-Rabin. On y trouve des massifs fleuris, un jardin romantique… Il y a aussi les vestiges d’une ancienne folie, mais ce ne sont que quelques pans de murs guère intéressants.
Bercy-Village
Des entrepôts subsistent ici, mais ont connu une reconversion en restaurants et boutiques. On oublie vite les immeubles en verre vus à l’entrée de la rue de Bercy !
Non loin de là, d’anciens chais, sur l’avenue des Terroirs de France, abritent le Musée des Arts forains : il présente des manèges, des automates…
Nous tournons à gauche, rue Baron le Roy, et continuons jusqu’à la place Lachambeaudie, avec une église à droite. Au numéro 5 de la rue de Dijon, remarquons un immeuble de style Art nouveau en briques avec des motifs floraux. De l’autre côté se trouve l’église Notre-Dame-de-la-Nativité de Bercy
L’église Notre-Dame-de-la-Nativité de Bercy
L’église paroissiale du village de Bercy a longtemps été l’église Sainte-Marguerite. Si vous vous souvenez de notre visite du onzième arrondissement, vous remarquez que ce n’est pas la porte d’à côté ! C’est pour cela qu’une première église est construite en 1677. Une seconde église prend sa place en 1825. Mais elle est détruite pendant la Commune, étant la seule église parisienne à subir ce sort. L’architecte Antoine-Julien Hénard la reconstruit à l’identique en 1873.
L’édifice, d’un style se basant sur celui des basiliques romaines antiques, est sobre. Le principal intérêt de la visite est la présence à l’intérieur de plusieurs tableaux du XVIIe et du XVIIIe siècle.
Nous traversons la voie ferrée, ou plutôt nous passons dessous, pour rejoindre le quartier Picpus.
Le quartier Picpus
Promenade sur la rue de Charenton
A droite, une plaque marquant une ancienne limite de la ville dans la première moitié du XVIIIe siècle se trouve au numéro 304.
A gauche, nous marchons jusqu’au numéros 199 et 201, où quatre atlantes supportent les deux grandes bay-windows de l’immeuble. Au dernier étage, plusieurs colonnes supportent le plafond au niveau d’un balcon en saillie, en dessous duquel figurent des guirlandes. L’immeuble a remporté un prix lors du concours de façade de Paris de 1911.
Si vous observez en détails chacun de ces atlantes, vous remarquerez que chacun représente un métier : un paysan, un ouvrier, un mineur et un marin.
Plus loin, au numéro 191, rue de Charenton, remarquons les mosaïques d’inspiration Art nouveau d’une ancienne bibliothèque.
A l’angle de la rue de Charenton et de l’avenue Daumesnil se trouve la mairie du douzième arrondissement. Après l’incendie de la première mairie lors de la Commune, l’architecte Antoine-Julien Hénard réalise cet édifice de style éclectique en 1876. Plusieurs motifs sculptés, dont deux statues représentant un ébéniste et un vigneron, décorent la façade.
Les métiers représentés ne sont pas dus au hasard : souvenez-vous que les ébénistes étaient nombreux dans le faubourg Saint-Antoine, et qu’à Bercy se trouvaient des entrepôts de vin.
L’avenue Daumesnil et les esclaves mourants
Tournons à gauche, avenue Daumesnil et marchons jusqu’au commissariat. Il faut lever la tête pour remarquer les statues entourant le toit. La Coulée Verte offre une autre perspective sur celles-ci. Je les avais manquées lors de mon premier passage. Pourtant, elles font sept mètres de haut ! Ces douze sculptures en béton, réalisées par Manuel Nunez-Yanowsky, sont une reproduction des Esclaves mourants de Michel-Ange. Ils représentent le fait que les policiers seraient esclaves de la loi. Un peu plus et je finirai par comprendre les messages des auteurs d’art moderne…
Au numéro 44 de l’avenue Daumesnil se trouve quelque-chose que je sais mieux appréhender : un immeuble de style Art nouveau. Avec la quantité de grappes de raisins qui se trouvent sous chacune de ses fenêtres, il serait difficile de le rater si les arbres ne le camouflaient pas. La façade du côté de la rue Guillaumot est plus facilement visible et se différencie par les briques rouges qui constituent en partie le mur. A l’angle, le toit rond à auvent est typique de l’architecture Art nouveau.
Nous tournons ensuite à droite, boulevard Diderot.
Retour boulevard Diderot
Remarquons l’immeuble aux numéros 44 et 46, immeuble Art nouveau en briques.
Tournons à gauche, rue Beccaria.
La place Aligre
La place d’Aligre est la place du marché du douzième arrondissement, qui se tient dans le marché couvert Beauvau. Si le marché se tient ici depuis 1777, le bâtiment actuel date de 1843. On y trouve une remarquable charpente, mais un incendie survenu en 2015 a causé beaucoup de dégâts.
Des façades
Au numéro 47 du boulevard Diderot, remarquons ce grand immeuble aux baies vitrées uniformes avec grillages, ses bay-windows arrondies et ses motifs végétaux. Il est impressionnant par sa taille. Et à l’angle, toujours ce même toit en coupole ovale.
Les passages du douzième
Plusieurs passages sont mitoyens de la rue de Reuilly. Malheureusement pour les touristes, ce sont des voies privées. Certains, comme celui au numéro 18, sont fermés par une porte opaque. D’autres sont néanmoins visibles à travers des grilles. Nous les verrons un peu plus loin durant notre visite.
Au numéro 19, deux têtes de lions encadrent la porte et un visage humain se trouve sur le fronton, ainsi qu’une coupe au sommet. L’immeuble, datant du début du XXe siècle, allie briques et pierres de taille.
Autour de la place de la Nation
Nous continuons notre route sur le boulevard Diderot, puis tournons à gauche, rue Claude Tillier. La rue du Faubourg Saint-Antoine, que nous prenons à droite, nous fait passer devant la Fondation Eugène Napoléon. L’impératrice Eugénie crée cette fondation en 1856. L’architecte Jacques Ignace Hittorff construit ce qui est d’abord un orphelinat de jeunes filles. Pour ce faire, il utilise l’argent que la ville de Paris aurait dépensé pour le collier que les élus voulaient offrir à l’impératrice. Petit clin d’œil à l’histoire, l’architecte réalise un bâtiment prenant la forme d’un collier. Mais cela est surtout visible depuis une carte ou une photo aérienne !
La place de la Nation
La rue du Faubourg Saint-Antoine débouche sur la place de la Nation.
En 1660, lors de l’entrée solennelle de Louis XIV et de la reine Marie-Thérèse d’Autriche, on installe un trône à l’endroit qui deviendra la place du Trône. Un projet d’arc de Triomphe est imaginé, mais les quelques pierres posées sont finalement retirées en 1716. A la Révolution, la place change de nom et devient la place du Trône renversé. Le 13 juin 1794, on y installe la guillotine. Au XIXe siècle, le projet d’arc de triomphe revient dans les esprits, et Napoléon III en imagine un en l’honneur des combattants en Crimée, en Italie, en Algérie, en Indochine… Finalement, la place devient place de la Nation lors de la fête du 14 juillet 1880 et c’est une statue qui occupe le centre de la place en 1899.
L’élément principal de la place de la Nation est sans aucun doute la statue centrale. Le Triomphe de la République, réalisé par Jules Dalou, représente la République debout sur un char tiré par deux lions. Trois autres statues sont des allégories de la Justice, de la Paix et du Travail. Derrière la statue se trouvent deux colonnes, plus anciennes. En effet, c’est l’architecte Claude-Nicolas Ledoux qui les y a mises en place en 1787. Depuis 1845, deux statues, représentant Saint-Louis et Philippe-Auguste, trônent sur ces deux colonnes.
Parmi les rues qui rejoignent la place de la Nation, remarquons la rue Jaucourt, encadrée par deux immeubles de style Art nouveau, avec deux coupoles typiques de ce style.
Un curieux immeuble
Si vous êtes un peu allés voir dans la rue Jaucourt, vous avez sûrement remarqué l’immeuble au numéro 6, de style néo-gothique, sur lequel se trouvent des troubadours et autres personnages. L’entrée se trouve au numéro 9 de la rue Fabre-d’Eglantine. Un haut-relief alchimique se trouve au-dessus de la porte ! Un élève de Nicolas Flamel dont la maison se trouvait dans la rue de Montmorency, dans le troisième arrondissement ?
Le cimetière de Picpus
À gauche, après avoir continué notre marche le long de la rue Fabre-d’Eglantine, le cimetière de Picpus se trouve au numéro 35 de la rue du même nom. Caché derrière la haute porte d’entrée, ce cimetière est la dernière demeure des victimes de la guillotine qui était installée sur la place de la Nation. Une association de familles des victimes la racheta ensuite. Il peut désormais se visiter, et est sûrement un bon moyen d’apprendre les noms de l’aristocratie parisienne de la fin du XVIIIe siècle !
La visite coûte 3€ et est possible l’après-midi uniquement.
La rue de Reuilly et d’autres passages
Faisons demi-tour puis tournons à gauche, rue du Sergent Bauchat. Nous sommes ainsi de retour dans la rue de Reuilly. A gauche, au numéro 101, l’immeuble ne présente aucun intérêt. Il est donc surprenant d’y trouver un bas-relief, pas extraordinaire, mais dont on se demande grandement ce qu’il fait là ! Dans l’autre sens, il y a plusieurs passages. Ce sont des voies privées, mais il est possible de les voir à travers la grille. Au numéro 81, l’impasse Mousset est constituée de maisons d’ateliers, tandis que plus loin, au numéro 67, la Cour d’Alsace-Lorraine accueille de nombreux ateliers, avec des façades colorées. Une variante de la rue Crémieux !
Sur le trottoir d’en face, l’église Saint Eloi est l’église la plus moderne que nous avons vue jusque là. La première église, de style roman, date de 1856, mais on la détruit déjà vingt ans plus tard. Ensuite, un édifice provisoire lui succède, jusqu’à la construction de l’église actuelle, en 1966. Le tout est résolument moderne : feuille en aluminium, charpente métallique, clocher faisant plutôt penser à une antenne téléphonique…
Sur le mur qui fait face à l’église, on peut voir un grand trompe l’œil représentant une serre et un couple regardant la rue. Remarquons en passant au niveau de la rue Montgallet l’immeuble au numéro 37, qui possède deux bow-windows. La rue Montgallet, tout comme la rue Jacques Hillairet, nous amène au niveau du jardin de Reuilly-Paul Pernin. La passerelle André Léo enjambe le jardin et permet à la Coulée Verte de le traverser et de continuer jusqu’au bois de Vincennes.
De retour sur l’avenue Daumesnil jusqu’au bois de Vincennes
Autour de la place Félix Eboué
En parlant de continuer jusqu’au bois de Vincennes, c’est exactement ce que nous allons faire, mais en marchant le long de l’avenue Daumesnil. Au numéro 181, la gare de Reuilly est un autre vestige de l’ancienne voie ferrée. C’est maintenant la maison des associations du douzième arrondissement. Au numéro 187, l’immeuble de style Art déco est un ancien centre téléphonique. L’architecte Paul Guadet a réalisé un immeuble en briques, soutenues par une armature en béton armé et décoré de grès émaillés colorés.
Nous arrivons sur la place Félix Eboué, un administrateur colonial parmi les premiers à s’être rallié au général de Gaulle en 1940. La fontaine au centre de la place est la fontaine du Château d’Eau, de Gabriel Davioud, qui se trouvait sur la place de la République avant de laisser sa place au Monument de la République en 1880.
Un petit tour dans la rue Taine permet de voir un immeuble de style Art déco au numéro 28.
L’église du Saint-Esprit
La population du quartier augmentant après la Première Guerre mondiale, on construit ici une nouvelle église entre 1928 et 1935. Sa façade en briques est d’une hauteur impressionnante, le campanile culminant à 75 mètres. L’architecte Paul Tournon réalise un édifice en béton armé s’inspirant du style des églises byzantines. Cette influence se ressent notamment avec la coupole, rappelant celle de Sainte-Sophie. De nombreuses fresques constituent un autre point d’intérêt de cette visite, bien que l’obscurité des lieux n’aide guère à leur appréciation. En cela, l’église du Saint-Esprit me rappelle l’église Saint-Pierre-de-Chaillot, que nous avions visitée lors de notre découverte du huitième arrondissement. Enfin, les fresques du chemin de croix donnent à celui-ci une apparence unique.
Lors de ma visite, un filet cachait la quasi-totalité du toit. Je n’ai donc pas pu admirer la coupole.
Remarquons en passant devant, l’immeuble en pierres et en briques au croisement avec la rue de Toul.
Le bois de Vincennes
Concernant la visite du bois de Vincennes, une journée n’est pas suffisante pour tout visiter. C’est une durée qui convient pour une promenade en douceur dans le bois. Je liste seulement ici les endroits à voir. Il y en a beaucoup dans ce bois, que des bus desservent, et qui ressemble plus à un immense parc municipal qu’à une forêt. D’ailleurs, si dans la forêt de Fontainebleau, les promeneurs marchent sur des sentiers, ici ils marchent sur des avenues ! Même quand il n’y a pas de voiture et que lesdites avenues sont en terre !
Le Palais de la Porte Dorée
Nous arrivons sur la place Edouard Renard, qui semble tout droit sortie d’une ville du sud-est de la France ! Deux rangées de palmiers et d’immeubles en briques encadrent la statue de la France colonisatrice.
Derrière, le Palais de la Porte Dorée est le principal bâtiment subsistant de l’exposition coloniale de 1931.
La porte Dorée est en fait la porte d’orée, en orée du bois de Vincennes.
Le Palais de la Porte Dorée est un imposant édifice de style Art déco entourant une cour intérieure (le maréchal Lyautey, qui fût résident général au Maroc, est à l’origine de cette disposition évoquant les riads marocains). En plus des formes géométriques qui indiquent le style du bâtiment, des bas-reliefs, réalisés par Alfred Janniot et mettant en valeur le rôle de la France pour ses colonies ainsi que leurs richesses ornent les façades. Le mur couvert de bas-reliefs est entouré d’un péristyle.
A l’intérieur, la cour centrale, couverte, est ornée de fresques glorifiant le rayonnement international de la France. De part et d’autre de l’entrée se trouvent deux salons, celui du maréchal Lyautey, commissaire général de l’exposition, et celui du ministre des colonies Reynaud. Dans le bâtiment se trouvent le musée de l’Histoire de l’immigration et l’aquarium tropical. Le musée de l’Histoire de l’immigration raconte l’histoire des immigrants en France depuis le XIXe siècle. On trouve également à l’intérieur du bâtiment une médiathèque riche de 20 000 ouvrages sur le sujet.
L’aquarium tropical, hébergeant des milliers d’animaux marins, a ouvert en 1931, en même temps que l’exposition. Il a longtemps été enrichi par les différents gouverneurs coloniaux, qui ont ramené des espèces exotiques des pays colonisés.
Un billet combiné donne accès au musée et à l’aquarium pour 12€. Sinon, chacun coûte individuellement 8€.
Des vestiges de l’exposition coloniale de 1931
Au sud du lac Daumesnil, le plus proche du Palais de la Porte Dorée, se trouve le Centre bouddhique qui, lorsqu’il est ouvert, permet de voir des vestiges de l’exposition coloniale de 1931 : grande pagode avec une statue dorée de Bouddha, ainsi que pavillons du Togo et du Cameroun. Le temple tibétain, quant à lui, s’élève ici depuis 1985.
Si l’envie vous prend de compter les tavaillons de bois qui composent le toit de la grande pagode, sachez qu’il y en a 180 000. Petite précision, c’est un détail, mais je viens de vous faire gagner beaucoup de temps.
Le parc zoologique de Vincennes
Dès 1860, le directeur du Muséum d’histoire naturelle prévoit de créer une annexe pour la ménagerie du Jardin des Plantes. Pour ce faire, il se voit accorder douze hectares dans le bois de Vincennes, mais faute de financement, le zoo ne voit pas le jour. En 1931 cependant, un lieu d’accueil et d’exhibition d’animaux exotiques apparaît comme un ajout intéressant pour l’exposition coloniale. Et l’emplacement de cette ménagerie dans le bois de Vincennes est propice pour cela. Le zoo de Vincennes à proprement parler est conçu en 1934 et complète ainsi la ménagerie du Jardin des Plantes. Compléter, et pas qu’un peu, car il est devenu bien plus grand !
Il est entièrement réaménagé entre 2008 et 2014 pour répondre au mieux aux nouveaux enjeux des parcs zoologiques. Le parc se divise en cinq zones représentant chacune un écosystème, c’est-à-dire une association entre un milieu (forêt tropicale, désert, savane…) et les animaux et plantes qui y vivent. Au milieu de tout ça, une immense serre de cent mètres de long recrée une atmosphère de forêt tropicale. Sans oublier le grand rocher, devenu le symbole du zoo.
La visite du zoo coûte 20€, 29€ pour un billet combiné avec l’entrée pour la ménagerie du jardin des plantes.
La ferme pédagogique de Paris
Moins impressionnante que le zoo de Vincennes, la ferme pédagogique de Paris, qui se trouve au sud du bois de Vincennes, propose une découverte et une initiation au travail à la ferme.
L’école du Breuil
En 1936, l’École municipale d’arboriculture de Saint-Mandé s’installe route de la Ferme. En 2015, l’école ouvre cinq hectares au public.
L’arboretum de Paris
A côté de l’école, dont le domaine est labellisé ecojardin, l’arboretum de Paris présente sur douze hectares une grande quantité d’arbres provenant des quatre coins du monde. J’y suis passé un peu vite lors de ma visite, mais je compte bien aller voir ça de plus près dans le futur !
Le château de Vincennes
Alors que le bois de Vincennes vient d’être acquis par la couronne au XIe siècle, Philippe Auguste y fait bâtir un manoir, que Louis IX complète d’une chapelle. C’est ici que ce dernier reçoit ceux qui viennent lui demander justice. Au XIVe siècle, les rois Philippe VI, Jean le Bon et Charles V construisent un château fort. Charles V aimerait bien y transférer son pouvoir, mais les nobles sont réticents à s’installer ici plutôt qu’à Paris.
De nouveaux aménagements interviennent au milieu du XVIIe siècle : Le Vau construit deux pavillons symétriques, le pavillon du roi et le pavillon de la reine, au sud de l’édifice, autour de la Cour royale. A cette époque, le donjon est devenu une prison d’Etat. Il accueille des prisonniers, toutefois mieux logés qu’à la Bastille. Sous Napoléon Ier, le château de Vincennes sert toujours : il devient un arsenal, mais on arase les tours et détruit les créneaux. Sa fonction de prison perdure à la Restauration, pour les opposants politiques tels que les républicains de gauche. Durant le Second Empire, on construit un fort près du château que Viollet-le-Duc commence à restaurer.
Les derniers travaux en date ont consisté à démolir les casemates du XIXe siècle et à rendre au château l’apparence qu’il avait au XVIIe siècle.
La visite du château de Vincennes est une promenade couvrant le XIVe siècle (donjon) et le XVIIe siècle (pavillons, cour Royale et portique nord…). De même, ce mélange d’époque se retrouve dans la chapelle de style gothique aux vitraux Renaissance.
La Sainte-Chapelle comporte de beaux vitraux au niveau de l’abside, représentant l’Apocalypse de Saint-Jean. Le reste des éléments décoratifs a énormément souffert durant la Révolution, si bien que l’intérieur est vide. On y trouve seulement l’autel et le tombeau du duc d’Enghien, Louis-Antoine de Bourbon-Condé, exécuté dans le fossé du château en 1804 et dont le tombeau a été placé ici par Louis XVIII. Les vitraux de la nef ont été détruits lors de la tempête de 1999, qui a endommagé tout l’édifice, placé en restauration jusqu’en 2009 !
L’impressionnant donjon, haut de 52 mètres, se visite également. On en apprend plus sur l’occupation des différentes salles, bien que les pièces soient vides, ainsi que sur la vocation de prison du lieu. En effet, des panneaux explicatifs présentent les prisonniers célèbres enfermés dans le donjon du château de Vincennes, ainsi que les graffitis laissés par certains prisonniers, en essayant de déterminer ce qu’ils indiquent et qui les y a écrits.
L’entrée coûte 9€.
Le lac des Minimes
Ce lac, dont le nom provient de l’abbaye des Minimes, permet, comme sur le lac Daumesnil, des promenades en barques. En revanche, les alentours du lac des Minimes sont plus calmes et moins fréquentés que ceux du lac Daumesnil. Au centre du lac se trouvent trois îles, dont deux sont inaccessibles au public, tandis que l’île de la Porte-Jaune accueille des réceptions.
Le jardin d’agronomie tropicale
Je n’ai pas vu beaucoup de flore tropicale dans ce jardin. En revanche, on trouvait ici au début du XXe siècle un jardin d’essais agronomiques pour les colonies françaises. Il avait pour but d’augmenter leur production. On trouve disséminés entre les arbres de nombreux vestiges de l’exposition coloniale de 1907. Malheureusement, ils se dégradent de jour en jour. C’est aussi le cas de certaines serres, aménagées par les occupants suivants sur site : l’école d’agronomie tropicale, le centre technique forestier tropical et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement). Cela donne une certaine ambiance au lieu !
Le pavillon Baltard : un morceau rescapé des Halles
Vous vous souvenez des Halles de Paris, que nous avions vues lors de notre visite du premier arrondissement ? J’avais alors écrit que l’édifice actuel remplace des Halles édifiées par les architectes Victor Baltard et Callet au XIXe siècle. Et j’avais alors précisé que l’un des pavillons se trouvait désormais à Nogent-sur-Marne. Le maire de la ville a en effet racheté l’un des douze pavillons, qui allaient être détruits, pour l’installer non loin du bois de Vincennes. En effet, celui-ci se trouve à 500 mètres de l’arrêt de RER de Nogent-sur-Marne, lui-même situé à un peu plus d’un kilomètre du lac des Minimes.
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Le parc zoologique de Vincennes
Le mot de la fin
Je trouve qu’il y a de moins en moins de choses à voir au fur et à mesure de nos visites, depuis que nous avons quitté le huitième arrondissement. Je l’avais déjà dit lors d’un article précédent, mais c’est dans le douzième arrondissement que cette impression est la plus forte. Nous avons tout de même pu découvrir quelques lieux pittoresques comme la Coulée Verte, et pu sortir de la ville pour nous promener dans le bois de Vincennes. Se balader en forêt, c’était une première après onze arrondissements très urbains !